28 juin 2020
Hubtobee évolue : lancement d’une application pour le télétravail
CEO de hubtobee, Benoit Rabourdin explique le positionnement de la plateforme dédiée aux voyageurs d’affaires, et son évolution face à la crise sanitaire. Benoit Rabourdin annonce ainsi le lancement d’une application visant à optimiser l’équilibre entre télétravail et vie de bureau.
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Pourquoi avoir lancé Hubtobee ?
Benoit Rabourdin – Nous sommes partis de plusieurs constats, et notamment du nombre de fois où l’on croise des collègues par hasard, des gens que l’on voit rarement pour cause d’éloignement géographique, et ce alors qu’aujourd’hui, avec le digital, on peut savoir en prédictif qui sera où et quand. Et dès lors profiter de la présence simultanée de plusieurs collègues pour optimiser cette énergie qu’est le voyage d’affaires. « Si seulement j’avais su que tu étais là » : avec Hubtobee nous voulons faire disparaître cette phrase. Nous voulons reproduire les bénéfices de la machine à café au fond du couloir mais au niveau mondial, au bout du monde, où des collègues se croisent mais sans le savoir. Pour se croiser, il suffit que l’une des deux personnes voyage. Cela signifie que notre outil intéresse non seulement les voyageurs mais aussi l’ensemble des collaborateurs. Souvent, on ne sait pas où va son propre voisin de bureau… Avec Hubtobee, il y a ce jeu de la transparence, du décloisonnement, qui permet de créer cet esprit de networking interne à l’entreprise. Il n’y a pas cette angoisse de révéler ses déplacements en externe, notamment aux entreprises concurrentes. Par exemple, si je m’apprête à aller à New York, et que je découvre que mon collègue de Tokyo, que je devais voir, en repartira la veille de mon arrivée, je peux très bien avancer légèrement mon voyage pour le voir sur place, et éviter de devoir aller au Japon quinze jours après. Cela m’épargne le temps de vol, le décalage horaire, la fatigue, mais c’est aussi pour l’entreprise une économie d’argent et de CO2 pour la planète.
Concrètement, quel est le fonctionnement du point de vue du voyageur ?
Benoit Rabourdin – Il réserve son billet comme d’habitude. Nous travaillons avec les agences de voyages, nous pouvons ainsi lui envoyer une notification lui indiquant : « vous allez à New York dans trois semaines, voulez-vous partager cette information afin de faciliter le networking au sein de votre entreprise ? » . Il lui suffit de cliquer sur oui ou non. Si la réponse est positive, cette information est partagée sur la plateforme au sein de l’entreprise, et tous ceux qui seront dans la même destination sur cette même période, et qui peuvent avoir un lien avec ce voyageur, auront accès à l’information. C’est du prédictif, non pas de la géolocalisation qui serait intrusive, et cela fonctionne vraiment sur la base du volontariat.
Quel est l’intérêt du point de vue de l’agence de voyages d’affaires ?
Benoit Rabourdin – Toutes les applications connexes qui apportent un service utile aux clients d’une agence de voyages sont intéressantes, puisque les TMC élargissent leur gamme de services à forte valeur ajoutée. Cela permet de conserver ses clients, et d’en attirer de nouveaux. Nous ne sommes pas les seuls : il y a pas mal de start-up qui gravitent ainsi autour des TMC, celles-ci étant friandes de nouvelles solutions, à raison.
N’y a-t-il pas une réticence chez le voyageur à partager ses informations de déplacement, qui peuvent susciter des jalousies, ou contrarier ses projets bleisure ?
Benoit Rabourdin – Il y a forcément une part de cela, mais d’une manière générale le grand voyageur a déjà assez expérimenté le bleisure, il n’a plus le temps d’en faire ou ça ne l’intéresse plus. Au bout d’un moment, son voyage est totalement transparent. Il n’a pas grand-chose à cacher : c’est son job de voyager, il rêve surtout de stabilité. Plus de 90% des voyageurs qui partagent leurs déplacements sur Hubtobee automatisent leur partage d’informations, ils ne se posent même plus la question.
N’est-ce pas le rôle du travel manager de veiller à ce que les voyageurs se déplacent moins et mieux ?
Benoit Rabourdin – Il s’agit surtout de gagner un temps fou, de bénéficier d’une opportunité de présence que l’on n’avait pas prévu… Chez un client comme Safran, 8% des utilisateurs disent avoir supprimé un voyage d’affaires grâce à nous, et ce en un trimestre. Nous le traduisons par autant d’économie sur le budget voyage et sur l’empreinte carbone. Notre cœur de cible, c’est le grand voyageur, qui représente 20% des équipes mais 80% des budgets voyages et de l’empreinte carbone. Ce grand voyageur, au bout d’un moment, rêve de voyager moins, ce que permet Hubtobee. L’effet de levier est donc très fort sur l’entreprise car il a un impact énorme, étant donné qu’il pèse tant dans le budget voyages.
Comment s’est passée la période du confinement au niveau de votre activité ?
Benoit Rabourdin – Bien sûr, comme les autres acteurs de ce secteur, tout était gelé. Mais la distanciation sociale a généré une distanciation par rapport à nos routines quotidiennes. La moitié de l’humanité a stoppé sa routine métro-boulot-dodo pendant trois mois. Tout le monde s’est retrouvé dans une posture de prise de recul, et je pense que dans l’esprit des gens est né tout un questionnement sur le sens de cette routine. Je connais des gens qui ont décidé de rester en province, en télétravail, quitte à accepter une baisse du salaire de 20%, car la vie est souvent moins chère en dehors de Paris. On s’est rendu compte qu’il faut un bon équilibre entre le distanciel et le présentiel.
Est-ce que cette crise a changé l’approche de la plateforme, son usage ?
Benoit Rabourdin – Nous disons depuis longtemps que la présence est un présent. Le Covid et l’isolement qui s’en est suivi l’ont confirmé. Hier, par défaut, on pouvait penser que tous les collègues de son site seraient sur place le lendemain. Aujourd’hui, avec l’essor du télétravail, on n’est pas sûr que ses coéquipiers sur un sujet donné seront là à telle ou telle date. Nous sommes donc en train de décliner l’application Hubtobee pour également gérer les coprésences sur le lieu de travail, ou dans un espace de coworking ou un autre tiers lieu près de chez moi. Ce qui intéressait auparavant le voyageur d’affaires se met à intéresser n’importe quel télétravailleur.
Vous avez donc fait évoluer l’outil ?
Benoit Rabourdin – Nous faisons évoluer l’outil pour qu’il ne soit pas seulement une plateforme pour entreprise internationale, mais qu’il devienne un outil quotidien parce qu’il ne sera plus si évident demain que les collègues d’un même étage soit là au moment où ils ont besoin les uns des autres. Il s’agit de savoir qui sera là mardi prochain, de prendre mes dispositions pour venir au bureau si un collègue arrive de l’étranger, etc. La partie hubtobee travel, notre cœur de business, va continuer. D’ailleurs cela fonctionne aussi sur les déplacements domestiques. Mais pour le télétravail, nous lançons une application d’usage hebdomadaire ou quotidien, les utilisateurs renseignant facilement leurs informations pour que chacun puisse voir en un coup d’œil qui sera là ou non sur différents lieux. Les deux outils sont différenciés mais peuvent se synchroniser.
Vous faites donc le pari que le télétravail va perdurer à moyen voire à long terme ?
Benoit Rabourdin – Tout à fait. Les chiffres le confirment. Tout le monde est maintenant convaincu que le télétravail est quelque chose de tout à fait viable, tout en étant conscient que le recours à cette distanciation physique à 100% est dangereuse, avec un risque de distanciation culturelle vis-à-vis de son entreprise et de ses collègues, de la notion de groupe, d’équipe. Il faut une hybridation entre le présentiel et le distanciel. Mais ce n’est plus le lieu qui importe, comme a pu l’être le bureau : c’est la coprésence, que ce soit sur son lieu de travail, au café du coin, ou dans tous ces tiers lieux. Il s’agit d’utiliser le vecteur de la mobilité des uns et des autres pour créer des points de rencontre intelligents, et utiles à chacun, qui soient sur leur chemin. Nous proposons aussi une logique de covoiturage aux entreprises. Là aussi, il y a des économies importantes en termes financiers mais aussi de CO2. Partager une voiture de location, un taxi, cela permet aussi de rencontrer et d’échanger avec des collègues. Il y a aussi un engouement sur ce dossier. Quand quatre collègues arrivent en même temps à la même gare sans le savoir, pour se rendre à la même usine, et que quatre voitures sont louées, c’est quand même dommage ! On n’a plus le droit de faire ça aujourd’hui, ne serait-ce qu’écologiquement mais aussi financièrement, et c’est pourtant encore très présent.
Pensez-vous retrouver un jour les volumes de déplacements d’antan, ou est-ce que justement ce volet télétravail doit compenser une baisse durable du volet travel ?
Benoit Rabourdin – Le télétravail est un besoin qui a surgi telle une révolution. C’est la concrétisation d’un vrai changement de paradigme, qui se réalise dès cet été et qui va perdurer sauf s’il est mal géré. C’est l’alliance entre une forme de liberté retrouvée et l’efficacité du digital et du présentiel intelligent grâce à des outils comme Hubtobee, car il reste indispensable pour le business de maintenir un lien physique. Il n’y a pas de bon networking sans rencontre. Qu’on le veuille ou non, la communication en format virtuel est tronquée, elle est très robotisée, la sérendipité ne se développe pas autant que lors d’un vrai contact en face à face.